La promesse de l'aube

Romain Gary
Gallimard, 391 pages
1960




Roman autobiographique d'une très grande intensité, La promesse de l'aube raconte les trente premières années de la vie de Romain Gary, écrivain, pilote de guerre, compagnon de la Libération.

Né en 1914 à Wilno (Vilnius), la capitale de Lituanie successivement russe et polonaise, Roman Kecew est élevé par sa mère, une actrice juive qui fonde d'énormes espoirs sur son fils. Trop peut-être puisque dès les premières pages, l'auteur révèle ce qui est cette fameuse "promesse de l'aube". Il s'agit en fait d'une double promesse. Celle que la mère fait au fils d'abord. (..)

"Ce fut seulement aux abords de la quarantaine que je commençai à comprendre. Il n'est pas bon d'être tellement aimé, si jeune, si tôt. Ca vous donne de mauvaises habitudes. On croit que c'est arrivé. On croit que ça existe ailleurs, que ça peut se retrouver. On compte là-dessus. On regarde, on espère, on attend. Avec l'amour maternelle, la vie vous fait à l'aube une promesse qu'elle ne tient jamais. On est obligé ensuite de manger froid jusqu'à la fin de ses jours. Après cela, chaque fois qu'une femme vous prend dans ses bras et vous serre sur son coeur, ce ne sont plus que des condoléances. On revient toujours gueuler sur la tombe de sa mère comme un chien abandonné (..) Je ne dis pas qu'il faille empêcher les mères d'aimer leurs petits. Je dis simplement qu'il vaut mieux que les mères aient encore quelqu'un d'autre à aimer. Si ma mère avait eu un amant, je n'aurais pas passé ma vie à mourir de soif auprès de chaque fontaine". (page 38-39)

A cette promesse maternelle répond la promesse du fils.

"Je n'entendais plus les rires, je ne voyais plus les regards moqueurs, j'entourais ses épaules de mon bras et je pensais à toutes es batailles que j'allais livrer pour elle, à la promesse que je m'étais faite, à l'aube de ma vie, de lui rendre justice, de donner un sens à son sacrifice et de revenir un jour à la maison, après avoir disputé victorieusement la possession du monde à ceux dont j'avais si bien appris à connaître, dès mes premiers pas, la puissance et la cruauté."

De Vilnius à Nice


Le roman se décompose en trois parties: la première parte raconte la prime enfance à Willno, les efforts que déploie la mère pour gagner de l'argent dans la confection et la vente de robes et de chapeaux auprès de la bonne société de la ville. Et les espoirs que la mère fonde sur son fils qu'elle voit ambassadeur de France, écrivain comme Tolstoï ou Victor Hugo.

La deuxième partie relate les années passées à Nice quand la mère de Romain Gary dirige l'hôtel Mermonts. Celui-ci se met à écrire, et commence des études de droits à Paris avant d'intégrer l'école de l'air à Salon de Provence. Mais sa toute récente naturalisation l'empêchera d'accéder au grade de sous-lieutenant, comme tous les autres élèves de sa promotion. Il ne sera que sergent, pour commencer.

Les années de guerre


La troisième partie abandonne le ton de l'humour et de la poésie et raconte les années de guerre. La défaite de 1940 d'abord avec des scène saisissantes sur l'aéroport de Bordeaux. Le gouvernement s'est réfugié en ville et tout ce que la France compte d'engins volants converge vers l'aéroport que Romain Gary décrit avec merveille comme un "Dunkerque aérien". Une ambiance qui n'est pas sans rappeler celle dépeinte par Antoine de Saint-Exupéry dans Vol de nuit chroniqué ICI sur le blog des Romans et des guerres.

Romain Gary décrit comment il tente de trouver un avion pour rejoindre le général de Gaulle à Londres. Il fera un crochet de plusieurs années par l'Afrique. Ce sera l'Algérie, le Maroc, l'Angleterre, puis le Mali, Koufra, la Syrie, la Palestine et à nouveau l'Angleterre d'où il s'envole pour des missions de guerre sur le front Ouest. L'ambiance est triste et sombre. Il raconte ses camarades disparus dans les crashs ou en combat aérien. Ses amours avortées. Il raconte aussi son arrivée sur le sol britannique, ses combats. Et la publication à Londres de son premier roman Une éducation européenne.

Une vie fidèle à la promesse initiale


Pendant toutes ces années de guerre, il recevra des lettres de sa mère. Plus de deux-cents. Le récit s'interrompt avec son retour à Nice à la Libération, où il pense retrouver sa mère. Mais il ne la retrouvera pas. Et c'est par un artifice qu'elle lui aura fait parvenir toutes ces lettres.

Romain Gary (1914-1980) aura connu une vie aventureuse fidèle aux ambitions que sa mère portait pour lui. Il fut Pilote de guerre, diplomate et écrivain célèbre.

Ci-dessous, une partie de l'émission Radioscopie de Jacques Chancel avec Romain Gary, réalisée en juin 1976. Romain Gary y apparaît comme détaché, désenchanté, nostalgique.








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