La Storia, Elsa Morante

Elsa Morante
Gallimard, 535 pages
1974





Ida Mancuso née Ramundo, originaire de Calabre, est veuve et institutrice à Rome dans les années 30. Elle vit avec son fils Nino alors que le régime fasciste étend chaque jour son influence sur la société italienne. En 1941, elle est violée par un soldat allemand saoul qu'elle ne reverra pas. Un enfant va naître, Giuseppe, qu'elle va s'attacher à protéger des tourments du monde et de la guerre. (..)


De San Lorenzo à Pietralata


Quand son appartement du quartier San Lorenzo est détruit par un bombardement, elle va trouver un toit avec son plus jeune fils dans le secteur de Pietralata, à l'extrême périphérie de Rome, dans un dortoir pour réfugiés.

Son aîné, Nino, (appelé aussi Ninnuzzu ou Ninnarieddu), vit d'expédients dans les rues de Rome, déserte le lycée, fréquente les Chemises noires fascistes, avant de rejoindre la résistance et les partisans. Il n'apparaît que par intermittence dans le roman.

Destins individuels et contexte international


C'est le roman de l'Italie en guerre, de Rome sous les bombes, de la misère des petits gens dans le grand chamboulement de l'Histoire et de la seconde Guerre mondiale. Des petites gens comme Ida et ses enfants, bien sûr, mais aussi comme le cortège de personnages qui se succèdent dans la grande salle des réfugiés, à l'instar de cette famille nombreuse surnommée "les Mille", ou encore l'étudiant anarchiste Vivaldi Carlo. Ida a une personnalité timide et effacée mais elle jouit d'une grande volonté qui lui permet de survivre malgré les privations et l'extrême pauvreté dans laquelle la guerre l'a plongée, elle et son jeune fils.

Elsa Morante s'attache en tête de chaque chapitre (un chapitre par année) à résumer le contexte international sur un ton détaché et parfois ironique.

La judéité refoulée d'Ida Mancuso


Elle met en scène également la judéité refoulée d'Ida. Sa mère, juive, l'avait fait baptiser, pour cacher "son secret hébaraïque" mais à la faveur des événements, Ida renoue avec cette identité refoulée. En 1938, quand les lois raciales imposent aux Juifs de se déclarer en mairie, elle y va, tétanisée, comme dans un état second. Cette inscription va d'ailleurs faire planer le suspense sur le sort d'Ida pendant toute la première partie du roman. Le retour de la judéité d'Ida apparaît aussi, dans ce même état second, quand celle-ci se rend à plusieurs reprises, comme attirée, dans le ghetto juif. Elle se sent en grande proximité et en empathie avec ses habitants. Au point qu'au moment de la rafle, elle se met à courir après une femme qui fuit, la rattrape pour lui glisser, en pleine course, qu'elle aussi est juive.

En cela, Elsa Morante s'est inspirée de son histoire familiale et notamment du fait que sa mère était juive. Elsa Morante, figure majeure des lettres italiennes, fut l'épouse d'Alberto Moravia.

La Storia donne également à lire de très jolie scènes d'amour fraternel entre Nino et Giuseppe, et de jeu avec le chien Blitz. C'est un roman sur la guerre mais aussi sur la maternité et l'enfance.

Ce roman publié en 1974 est présenté comme le grand roman de l'Italie de la seconde moitié du XXe siècle.


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